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Le parcours d’Emma W
Ecrit par Luc MASSON le 15 mars 2010

Bonjour à toutes et à tous,

Je suis Florence la maman d’une petite fille extraordinaire qui s’appelle Emma et dont je vais vous relater le parcours.

Tout a débuté en septembre 1998, le 13 très exactement, date à laquelle j’ai rencontré son papa, Reynald. Comme beaucoup de jeunes, nous vivions notre petite vie tranquillement. L’année suivante, nous nous sommes mis en ménage. Nous avions chacun notre travail. Tout se passait pour le mieux.

En 2000, nous avons commencé à parler d’avoir des enfants. Nous avons mis donc la machine en route…


L'adorable petite frimousse d'Emma !

Au bout d’un an d’attente, toujours rien. J’ai donc pris rendez-vous avec mon gynécologue qui m’a alors prescrit plusieurs examens. Ces derniers se sont révélés mauvais : je ne pouvais pas avoir d’enfants si je ne suivais pas un traitement lourd. En effet, non seulement je n’avais aucune ovulation, mais qui plus est la substance blanchâtre qui servait à aider l’ovulation se révélait acide, ce qui faisait qu’elle détruisait les spermatozoïdes dés le départ.

J’ai donc commencé un traitement par piqures. Et aussi étonnant que cela puisse paraître, sous traitement, j’ovulais énormément : ils m’ont ponctionné jusqu’à 21 ovules ! Tout cela a durée 4 ans et demi, entre les pertes directes et les fausses couches. La dernière a été la bonne, je dis la dernière car j’étais épuisée moralement et j’avais énormément grossi à cause du traitement.

Lors de cette dernière implantation de deux œufs, tout se déclencha en moi : je ne saurais comment l’expliquer mais je savais que j’étais enceinte au bout de deux heures… et cela se confirma au bout de quinze jours lors des résultats de la prise de sang. Quelle joie nous avons eu ce jour là !

La grossesse se déroula calmement : une échographie tous les quinze jours pour savoir si tout se passait bien et si mon corps supportait bien le fait d’avoir des jumeaux. Car si d’apparence je suis costaude, l’intérieur lui n’était pas très élastique à ce qu’on disait !

Au 2ème mois, nous avons su les sexes des enfants : un garçon et une fille ! Le choix du roi, un pur bonheur !

Jusqu’au 7ème mois, tout se passait comme dans un rêve. J’étais certes fatiguée, mais je n’avais pas à me plaindre. Je devais par contre me reposer un maximum. A la visite du 7ème mois, mon gynécologue m’a recommandé de rester allongée car les bébés n’avaient plus de place. Il ne fallait donc pas les fatiguer. Il devait me revoir la semaine suivante pour un monitoring. Celui-ci se passa très bien. Un rendez-vous fut pris encore la semaine suivante, le mardi le 20 juin 2006, pour un autre monitoring. Et là, tout s’est accéléré : le monitoring n’était plus bon du tout ! Romain souffrait en effet au niveau du cerveau car sa sœur l’écrasait. Il me garda et me fit une piqure pour que les organes des jumeaux arrivassent à maturation, ainsi qu’une autre le lendemain. Accouchement prévu pour le jeudi 22 juin.

L’accouchement s’est passé à merveille : on m’a fait une césarienne qui se déroula sans encombre. Au bout de 20 minutes à peine, les jumeaux étaient tout les deux là, deux petits êtres minuscules. Ils ont crié de suite et les examens cliniques étaient excellents. Emma est sortie la première à 11h57. Elle pesait 1k820g et mesurait 44 cm. Romain est sorti à 12h00. Il pesait 1k640 g et mesurait 47cm. Ils ont passé 3 semaines au service de néonatalogie. Je m’y rendais tous les jours dés ma sortie. Je passais mes journées complètes avec eux pendant que papa était au travail.

Les médecins nous ont donné l’autorisation de sortie le 14 juillet. Quelle joie !... et en même temps beaucoup de stress car désormais nous allions être 4 à la maison : beaucoup de chamboulement en perspective, et ce n’était pas peu dire !

L’arrivé à la maison s’est très bien passé pendant 3 semaines. Puis Romain s’est mit à régurgiter tout ses biberons, sans exception. Après maintes et maintes visites aux urgences, un pédiatre a prescrit une échographie de l’estomac pour me rassurer. Et je me dis que j’ai bien fait d’insister car d’un coup d’un seul, ce qui était bénin devenait extrêmement urgent : Romain souffrait d’une sténose du pylore aggravante et le lait avait commencé à remplir ses poumons.

Direction l’Hôpital Jeanne de Flandres à Lille. Première séparation avec Emma. Cela fût très dur ! Mais ma mère l’a très bien soignée. Le lendemain de notre arrivé à l’hôpital, Romain a été opéré. Tout se passa très bien, nous avons même eu le droit de sortir le samedi suivant car il reprenait du poids rapidement. Après deux consultations avec son chirurgien, il s’avéra que nous n’aurions plus besoin de nous déplacer sur Lille car tout était rentré dans l’ordre.

De retour à la maison, nous avions repris notre rythme habituel, c’est-à-dire biberons toutes les 3 heures aussi bien de jour que de nuit. Heureusement que papa était là pour relayer car je ne sais pas comment j’aurais fait sans lui !

L’été touchait à sa fin et nous avions décidé de prendre quelques jours de vacances en septembre. Départ pour la Normandie. Nous n’y sommes restés que cinq jours car les jumeaux n’ont pas arrêté de pleurer !... Et comme par hasard, de retour à la maison, ils se sont calmés !


Une adorable petite crapule !

Au mois d’octobre, Emma a commencé à pleurer sur chaque biberon. Notre pédiatre parlait de régurgitations et nous a prescrit du Gaviscon®. Cela ne donna aucun résultat concluant, voire même l’effet inverse puisqu’Emma arrêta de s’alimenter. Toujours sur les conseils de la pédiatre, nous avons changé de lait. Nous sommes passés au lait Gallia® Soja avec un traitement de Gaviscon® et Mopral®. La situation s’améliora enfin et Emma a commencé à nouveau à reprendre du poids.

Visite du cinquième mois. Pour Romain, tout était « normal ». Pour Emma par contre, c’était un peu plus compliqué : elle ne tenait toujours pas sa tête et ne prêtait plus aucune attention à ce qui se passait autour d’elle ; elle avait également du mal à grossir et son périmètre crânien avait beaucoup de mal à « décoller » (elle était à -3ds sur la courbe). Sur les conseils de la pédiatre, nous avons pris rendez-vous au C.A.M.S.P.(1) de Calais en janvier 2007. Entre temps, Emma a passé une I.R.M.(2) ainsi qu’un E.E.G.(3). Les deux examens sont apparus normaux pour son âge.

17 janvier 2007, rencontre avec l’équipe médicale du C.A.M.S.P. de Calais. A la suite de cette visite, Emma s’est vue prescrire un corset siège. On nous a également demandé de prendre rendez-vous avec un ophtalmologue pour sa vue qui était très hésitante.

28 février 2007, consultation avec un ophtalmologue donc sur Boulogne. La visite fût très compliquée : Emma ne s’est pas laissée faire et a même fini par hurler. Le docteur avait une patience d’ange et a tout de même réussi à prescrire des lunettes ainsi qu’un cache. Il nous a également demandé de prendre rendez-vous sur Lille pour faire des potentiels évoqués visuels. Dès notre retour à la maison, j’ai appelé Lille. Rendez-vous a été pris pour mars. Tout cela allait tellement vite que nous n’avions pas le temps de penser.

15 mars 2007, départ pour Lille. Arrivés là bas, nous avons été très bien accueillis. Par contre, la visite s’est déroulée moins bien que prévue : les deux premières heures, Emma râlait un peu mais faisait tout de même ce qu’on lui demandait ; mais après le repas, Emma était fatiguée et voulait faire la sieste, seulement il fallait finir ces fameux examens, ce qui fût loin d’être une partie de plaisir ! Elle s’est mise à hurler et à se débattre. De sorte que pour le dernier examen, il a fallu appeler deux internes pour tenir Emma tandis qu’un 3ème lui ouvrait les yeux pour prendre une photo. Quel soulagement une fois tout cela fini ! Les résultats nous ont été donné tout de suite : Emma est hypermétrope astigmate avec un strabisme important. Il fallait donc absolument qu’elle portât des lunettes.

De retour chez nous, nous avons pris rendez-vous avec les médecins du C.A.M.S.P. la semaine suivante. Trois séances de kiné par semaine ont alors été prescrites. Ce ne fût guère évident car Emma ne supportait pas d’être touchée, mais à force de persévérance et de patience, tout se passa bien.

En Juin, nous avions un rendez-vous avec le Dr Jorriot de Lille. Après un examen approfondi, elle nous a demandé de prendre rendez-vous avec le Dr Vincent-Delorme, généticienne. Nous lui avons alors demandé à quoi elle pensait. Elle nous parla d’un syndrome, celui d’Angelman. Une fois rentrés à la maison, je me suis renseignée sur Internet. Ce que j’ai pu lire m’a laissé sur les rotules : on parlait d’épilepsie, de retard mental et de gros retards dans les acquisitions. Pour ne pas tomber dans la dépression, nous avions décidé d’attendre ce rendez-vous sur Lille qui aurait lieu le 20 mai 2008. D’ici là, ce qui comptait, c’était qu’Emma continuait ses séances de kiné.

En novembre un I.R.M. a été fait et a montré un système ventriculaire passivement élargi ainsi qu’une atrophie/hypoplasie de la substance blanche cérébrale.

L’année 2007 se termina sans trop d’encombre et lors des fêtes de Noël, les jumeaux furent plus que gâtés.

20 mai 2008, nous sommes enfin reçus par le Dr Vincent-Delorme. Elle nous a posé un tas de questions pour le dossier. Elle a ensuite ausculté Emma qui se laissa faire. Elle partit même dans un fou rire incontrôlable, ce qui a fait sourire tout le monde ! A la fin de la consultation, elle nous a dit qu’elle soupçonnait aussi un syndrome d’Angelman. Néanmoins pour en avoir la confirmation, elle a fait faire une prise de sang à Emma au laboratoire qui se trouvait au bout du couloir. La prise de sang faite, nous sommes rentrés à la maison.

Plus aucune visite de spécialiste pour le moment, juste la pédiatre et le médecin traitant… jusqu’au jeudi 17 juillet. Ce jour, nous nous sommes mis en route pour aller à la séance de kiné. A peine arrivés là bas, Emma s’est mise à vomir de tout son saoul. J’ai aussitôt repris la route pour partir directement aux urgences car elle avait les yeux qui se révulsaient. Une fois arrivées, Emma a été aussitôt pris en charge. Au bout de deux heures, on nous a fait monter dans le service de pédiatrie… où nous resterons 6 jours. Nous en sommes ressortis avec un traitement pour l’épilepsie : et oui, nous voilà avec une petite fille épileptique !... ce qui, je vous l’avoue, a été dur à digérer. Un traitement avec de la Micropakine® a été mis en place. Le résultat de l’E.E.G. qui a été réalisé durant notre séjour paraissait confirmer le syndrome, mais sans aucune certitude car ayant eue le docteur généticien entre temps au téléphone, elle me dit que les résultats étaient revenus négatifs et qu’il fallait faire d’autres analyses. Elle nous a envoyé les certificats médicaux pour faire des prises de sang mais plus seulement pour Emma : son père et moi devions en faire une aussi. Aussitôt dit, aussitôt fait. Les résultats sont tombés le 2 février 2009, toujours négatifs : son père et moi n’étions pas porteurs du gêne.

Entre le temps des analyses et des résultats, Emma n’a plus fait de crise. Les médecins et nous-mêmes étions tous contents car le traitement fonctionnait bien !

En avril 2009, lors d’une consultation au C.A.M.S.P., un standing-up a été prescrit à Emma afin d’être en position debout. Cela lui plaisait : elle était heureuse de pouvoir enfin être à la hauteur de son frère !


J'adore me mettre debout !

Puis arriva cette journée du 7 juin 2009. Emma se réveilla au petit matin en hurlant. Tout de suite je suis allée la voir : elle était en pleine crise de convulsion et tout son côté gauche était recroquevillé. Départ pour les urgences. Arrivés là bas, ils nous ont immédiatement pris en charge. Emma n’était toujours pas calmée et cela faisait 25mn maintenant qu’elle était dans cet état. Au bout d’une heure quinze, elle se calma et on nous a fait rentrer chez nous… sans changement de traitement.

8 juillet 2009, rebelote : une autre crise. Cette fois, c’était une poupée de chiffon que j’avais dans les bras ! Emma respirait très doucement, c’était à peine si on l’entendait respirer. Elle a été hospitalisée durant 7 jours et les médecins ont fini par augmenter sont traitement. Elle a également passé un E.E.G. qui s’est révélé inefficace car beaucoup trop agitée. Retour à la maison. La fin de l’été approchait…

En septembre, préparatifs pour la rentrée scolaire de Romain. Cela n’a pas été facile : pendant trois bonnes semaines, il nous a demandé tous les matins pourquoi Emma, elle, n’allait pas à l’école. Après maintes explications, il a compris.

En octobre, retour des crises, plus légères par rapport aux autres. Comme Emma ne faisait « que convulser », pour les médecins, il n’y avait « rien de vital » (ce sont les mots exacts du neuropédiatre !). Comme cela commençait à m’excéder quelque peu, j’ai décidé de prendre rendez-vous avec un spécialiste sur Paris.

13 novembre 2009, date du rendez-vous, nous nous sommes rendus sur Paris. Dés que nous sommes rentrés dans son bureau, les premiers mots qu’elle a eu en voyant Emma ont été : « Ah tiens, une petite fille qui a le Syndrome de Rett ! ». Avec mon mari, nous nous sommes regardés et nous lui avons demandé de répéter et de nous expliquer ce qui lui faisait dire cela. Elle a pris tout son temps pour nous expliquer que rien qu’en voyant Emma entrer, pour elle, il ne pouvait pas s’agir d’autre choses car elle avait un caractéristique de ce syndrome, à savoir « faire le raton laveur » (elle a constamment les mains en bouches comme si elle se lavait !).

Donc, pour pouvoir faire la lumière sur tout cela, elle nous a demandé de faire des examens supplémentaires à Emma, dont une ponction lombaire. Mais pour tout faire dans les règles, elle voulait l’accord de Lille. Etant en congés, nous attendions donc le retour du docteur mais nous pensions que tout allait se mettre rapidement en place. Toutefois entre deux, les crises d’Emma se sont intensifiées. Le neuropédiatre nous a alors prescrit du Valium® en intra-rectal. Cela l'a soulagée de suite, ce qui forcément lui faisait du bien à elle mais à nous aussi car ce n’était plus possible de la voir souffrir comme ça,

La dernière crise remonte à quatre semaines maintenant. Romain était à l’école et moi de retour à la maison avec Emma. Il était 9h20 lorsqu’Emma a fait une crise très violente avec perte de connaissance. Nous avons eu la peur de notre vie ! Très vite, je lui ai mis son Valium® et un peu d’eau fraîche sur le visage. Elle est revenue à elle en quelques secondes. J’ai alors appelé son neurologue pour le lui expliquer, ce à quoi il m’a dit que si elle venait à perdre à nouveau connaissance, je devais l’emmener le voir mais qu’il ne fallait pas paniquer !!!

Ce qui m’a fait le plus bizarre encore, cela a été lorsque j’ai été récupérer Romain à l’heure du midi. En effet son maître m’a demandé comment allait sa sœur jumelle. Etonnée, je lui ai alors expliqué la crise survenue le matin même, et là, il m’a annoncé que Romain avait également eu un léger malaise dans la matinée et avait dit « Emma a bobo tête ». Sur le coup, je me suis dit que son maître rigolait, mais non il était sérieux ! Il a même pu me donner l’heure exacte !!! Comme quoi, les jumeaux, même faux, ont un lien irrationnel qui les unit ! Cela s’est d’ailleurs confirmé un autre jour lorsque j’étais en séance de kiné sur Calais avec Emma : elle a eu une absence et Romain s’est levé de la sieste à l’école en disant « Emma bobo tête ». Le médecin traitant m’a dit de ne pas m’inquiéter, que cela allait lui passer en grandissant… mais je vous assure que cela fait tout drôle !


Avec son frère jumeau Romain, un lien quasi fusionnel !

Puis nous voilà un samedi après-midi. Alors que je faisais quelques achats dans un magasin de sport, j’ai entendu quelqu’un m’interpeller : c’était César PLAISANT. Ayant remarqué la poussette de la marque Otto Bock® d’Emma, il m’a demandé si j’étais la maman d’une enfant handicapée. Je lui ai bien évidemment répondu que oui. Il m’a alors expliqué qu’il était l’un des 3 papas fondateurs d’une association pour enfants polyhandicapés et épileptiques. A la suite de quoi, il m’a laissé ses coordonnées. En rentrant à la maison, j’ai décidé d’aller sur le site. Il m’a fallu 4 jours pour tout lire. Et suite à cela, avec mon mari, nous avons décidé de prendre contact… et nous voilà maintenant membres d’INJENO !

Voilà, vous connaissez notre parcours depuis le début.

Je voulais encore vous dire à toutes et tous que j’admire la force avec laquelle vous vous battez au quotidien pour faire en sorte que la vie de votre enfant ressemble à celle de n’importe quel autre enfant, même si cela s’avère très compliqué car le regard des autres est parfois plus méchant que des mots.

A très vite au sein de l’association !...

''__Parents d’Emma… et de Romain__''
Emma, tendrement lovée dans les bras de sa maman Florence !

Florence & Reynald
Parents d’Emma… et de Romain

(1) C.A.M.S.P. : Centre d'Action Médico-Sociale Précoce

(2) I.R.M. : Imagerie par Résonance Magnétique

(3) E.E.G. : Electro-EncéphaloGramme

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